Movember | Tout ce qu’on ne vous a jamais dit sur les hormones masculines! Écrit le .
Posté dans Catégories: Hormones.
Tags: Capacités cérébrales, Émotions, Hormones androgènes, et Movember.

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En ce mois dédié à la sensibilisation aux problèmes de santé des hommes, l’AQNP s’est prise au jeu d’examiner à la loupe les hormones masculines, aussi appelées hormones androgènes, que nous ne connaissons que trop peu! Pour cela, nous avons échangé avec Alexandra Brouillard et Lisa-Marie Davignon, deux doctorantes en neuropsychologie à l’UQAM qui ont pour objet d’étude les hormones sexuelles, ainsi que leurs effets sur notre cerveau. On prend les paris qu’au moins un des faits énoncés ci-dessous devrait vous surprendre!

Les hormones androgènes : cours 101

Commençons par définir ce qu’est une hormone androgène, et quel est son rôle d’un point de vue physiologique. 

« Il s’agit d’une catégorie d’hormone sexuelle, c’est-à-dire une petite substance chimique qui sert à transmettre des messages dans le corps de façon générale » explique Lisa-Marie Davignon. « Plus spécifiquement, les androgènes sont les hormones qui vont réguler le développement et le maintien de caractéristiques secondaires masculines comme la pilosité, les changements dans la voix ou la masse musculaire. Elles servent aussi à la formation de sperme, par exemple. Il y en a plusieurs types, dont la testostérone. » Et, outre la testostérone, les hormones androgènes sont constituées, en bien plus petit nombre, de : la déhydroépiandrostérone (DHEA), l’androstènedione, l’androstérone, le sulfate de déhydroépiandrostérone (DHEAS), l’androstènediol et l’androstanolone. 

Comme vous vous en doutez, ces hormones sont très peu produites pendant l’enfance, et sont sécrétées massivement à la puberté. « C’est pour ça qu’on observe tous ces changements chez les garçons à l’adolescence! », fait-elle remarquer.

1. Le cerveau est influencé par nos hormones

Messieurs, avez-vous déjà envisagé que votre fonctionnement cérébral puisse être influencé par vos hormones? Car oui, c’est bien le cas! En effet, comme l’explique Alexandra, « les hormones ont des récepteurs et se fixent dans le cerveau. Tant les hormones androgènes qu’estrogènes peuvent avoir une influence sur le cortex frontal par exemple, donc toutes les fonctions exécutives vont pouvoir être influencées par les hormones sexuelles. » Aussi, les hormones vont se fixer dans les régions sous-corticales comme l’hypothalamus et le système limbique (notamment l’amygdale et l’hippocampe). De là, on en déduit donc qu’elles peuvent avoir une influence sur notre cognition et nos émotions.

2. Les fluctuations hormonales, ce n’est pas que chez les femmes!

Commençons par nuancer ce fait, car on imagine déjà certains lecteurs sceptiques qui se mettent à sourciller. Bien sûr, les hommes n’ont pas des cycles hormonaux marqués et définis comme ceux des femmes. Pour les hommes, les changements majeurs en termes d’hormones ont lieu à la puberté et lors de l’andropause (qui est le pendant masculin de la ménopause, où l’homme perd ses capacités de reproduction).

Toutefois, au quotidien, on peut tout à fait observer des petites fluctuations de testostérone, bien plus subtiles que les variations propres au cycle menstruel. Par exemple, Lisa-Marie révèle que « la testostérone suit un cycle circadien où elle va être plus élevée le matin, avant de diminuer tout au cours de la journée. » Et ce n’est pas tout! « Selon les saisons, la sécrétion d’hormones androgènes va aussi changer. » En fait, il s’avère que la testostérone est une hormone très réactive qui varie en réponse à de nombreux contextes et facteurs (environnementaux, notamment).

3. Hormones masculines et bien-être psychologique, une association à faire?

« Les prévalences de santé mentale indiquent que la dépression et les troubles anxieux affectent environ deux fois plus les femmes que les hommes », illustre Alexandra. Donc, à partir de cette prémisse, la question du rôle des hormones prend tout son sens et des chercheurs tendent à explorer cette piste. « Selon certaines études, plus un individu aurait d’hormones androgènes naturellement produites, meilleure serait sa santé mentale ». Toutefois, ce n’est pas aussi simple que ça, et il faut éviter de faire des rapprochements trop rapides tels que “la testostérone est synonyme de meilleure santé mentale”. « Mais, il est raisonnable de dire que les hormones androgènes peuvent avoir un rôle bénéfique sur le bien-être psychologique », termine notre interlocutrice. 

4. La virilité, ce n’est pas (qu’)une affaire de testostérone

Dans les idées reçues les mieux classées de notre société, retenons cette association qui est faite entre testostérone et masculinité : « On pense toujours que la testostérone, c’est les hommes; et l’estrogène, c’est les femmes », illustre Alexandra. « Mais en fait, ce que peu de gens savent, c’est que la testostérone peut être transformée en estrogène – estradiol -, donc il y a une enzyme de conversion qui va modifier l’hormone en une autre. » Vous l’aurez compris, cette affirmation n’est donc pas aussi juste que ça, puisque la testostérone peut devenir… une hormone féminine!

« Je glisserais d’ailleurs bien un mot au sujet de la testostérone et l’agressivité, la dominance et la compétitivité », avance Lisa-Marie. « Dans la culture populaire, on associe la testostérone à un comportement plus agressif; mais des études montrent que l’effet de la testostérone sur l’agressivité ne serait pas présent chez des gens qui ont une bonne maîtrise d’eux-mêmes ou qui n’ont pas une tendance naturelle vers la dominance », précise-t-elle. La personnalité de la personne serait donc à prendre en compte, sans compter le rôle de l’hormone cortisol (aussi appelée « hormone du stress »). « Quand quelqu’un a beaucoup de testostérone et beaucoup de cortisol, on ne voit pas nécessairement la relation entre testostérone et agressivité. »

5. Certaines capacités cognitives mieux développées chez les hommes : mythe ou réalité?

Les hormones masculines, et plus particulièrement la testostérone, auraient un rôle à jouer dans les habiletés de rotations mentales et visuospatiales spécifiques (par exemple, quand on a des objets tridimensionnels qu’on doit manipuler dans notre tête). « Ce sont des tâches pour lesquelles les hommes ont souvent été rapportés comme meilleurs que les femmes », admet Lisa-Marie. «Par contre, de plus en plus d’études tendent à ne plus montrer ce lien-là », nuance-t-elle. «L’écart de rôles de genres entre les hommes et les femmes tend à diminuer, et les femmes seraient davantage exposées à des expériences de vie qui les amènent à développer ces habiletés, ce qui amoindrirait l’écart entre les sexes par rapport à ces habiletés.» Mais, même si ça tend à diminuer, c’est encore bien là!

6. Les hormones androgènes de synthèse, une fausse bonne idée?

Les hormones androgènes qui ne sont pas sécrétées naturellement – par exemple, quand on les prend de façon artificielle via des stéroïdes anabolisants – ne seraient pas sans risque, a priori. « Plusieurs études ont montré que des utilisateurs d’androgènes exogènes (dans le but de développer la masse musculaire, par exemple) présentaient une dégénérescence cérébrale due à un abus de ces hormones », illustre Alexandra. « Cela aurait des répercussions sur la cognition, puisqu’on observerait des problèmes de mémoire, d’attention, de fonctions exécutives, donc des fonctions de haut niveau d’organisation et de planification. » Les scores neuropsychologiques de ces hommes sont généralement plus faibles comparativement aux hommes n’en utilisant pas. « Donc, avoir des concentrations trop élevées d’androgènes peut être nuisible pour le cerveau et la cognition », conclue-t-elle. 

Nous espérons que vous aurez appris des choses en lien avec les hormones masculines et leurs effets sur le cerveau. En attendant, nous vous souhaitons un bon Movember à tous et à toutes! Et pour découvrir nos autres billets de blogue, cliquez ici

Merci à Alexandra Brouillard et Lisa-Marie Davignon, toutes deux doctorantes en neuropsychologie à l’UQAM et spécialisées dans les effets de la pilule contraceptive sur le cerveau, pour leur précieuse contribution.

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