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Syndrome dysexécutif important = interventions difficiles!
Bonjour à tous,
Je me lance, je vous soumets ma première discussion de cas “virtuelle”. Je vais tenter d’être bref, voire télégraphique, mais aussi le plus complet à la fois.
Il s’agit d’un homme d’une 50aine d’années, célibataire et sans enfant, que j’ai évalué à l’hiver 2011, en raison de problèmes de comportement et d’organisation et parce que son frère ne voulait plus l’héberger. Dans le dossier, on décrivait toutes sortes de problématiques qui démontraient une absence d’autonomie: hygiène qui laissait à désirer (ex. son frère avait déjà été obligé de nettoyer des selles sur les tapis et murs de la salle de bain), récupération d’objets salles provenant des poubelles (nourriture, journaux), incapacité à se nourrir adéquatement, combinaisons alimentaires bizarres, chambre encombrée, cycle éveil-sommeil perturbé. Bref, on commence à se faire une idée du type d’atteintes.
Développement/psychosocial: accouchement difficile, aucune autre info. de dispo. Selon son frère: isolé durant toute son enfance et son adolescence, ne mangeait que très rarement avec sa famille. Jusqu’à tout récemment, monsieur est toujours demeuré avec ses parents. Ceux-ci s’occupaient généralement de toutes les activités quotidiennes et domestiques. Monsieur est allé vivre avec son frère suite aux décès des parents, il y a environ 10 ans. Réseau social pratiquement inexistant.
Scolarité/travail: Dernière année complétée de niveau collégial (techniques administratives), mais aucun programme terminé. Très peu d’expériences professionnelles: une expérience de stage dans les années 80 (collecte de données dans un journal) et quelques stages brefs au début 90. Aucune source de revenu.
Atcds: neurologie en 85: atrophie cérébrale diffuse et atrophie vermienne plus marquée (scan CT). EEG normal. On concluait que ça pouvait expliquer le bégaiement et les tics. Psychologie en 81: QI dans la moyenne, avec “troubles de la personnalité assez importants” (faible sociabilité, difficulté d’adaptation aux situations nouvelles, antipathique et manque de tact. Orthophonie en 73 et 85: bégaiement sévère et faible assiduité aux traitements. ** à noter que M. n’a pas de MD et que le dernier r-vous médical date de nombreuses années, voire une dizaine d’années.
Médic./substances: rien de ce côté.
En entrevue, on a affaire à un homme chétif, maladroit, d’apparence très négligée, qui bégaie énormément, qui fait beaucoup plus vieux que son âge. De bonne humeur et collaborant. Curieux, sociable. Problème très important de persévérations sur les pensées, questions, comportements. On doit le ramener à la tâche à chaque 5 secondes. Une anxiété est palpable surtout en lien avec les interactions sociales. M. dit vouloir vivre en milieu rural, parce que les gens sont moins méchants.
Résumé du côté psychométrique: QI limite (CV et MDT = moyenne) (VIT = déficitaire; RP = limite). Attention divisée déficitaire, voire impossible. Mémoire: beaucoup d’intrusions au premier rappel en verbal. Je dois arrêter la tâche parce que c’est impossible à réaliser. Sur le plan visuel, la récupération nécessite des indices, mais l’encodage et la consol. sont préservés. Mém. autobio. ça va. Langage: écholalie aux réponses de type oui/non. Le reste est préservé. Calcul: haute-moyenne à Arithmétique si on fait abstraction du temps (!). Fx visuo-perceptives préservées, mais des erreurs notées aux fx visuo-constructives sont tributaires des fx exécutives. Fx exécutives: sans tout décrire, presque toutes les sphères sont affectées de façon importante, mis à part la régulation des affects, et consistent en la principale faiblesse de M.
Conclusion: syndrome dysexécutif (d’origine développementale fort probable), puisque plusieurs des atteintes/comportements affichés sont présents depuis l’enfance/adolescence. Le frère a noté une légère exacerbation depuis les 10 dernières années. Ce volet est difficile à quantifier parce que les parents sont justement décédés il y a une dizaine d’années et s’occupaient grandement du fils. Je recommande un hébergement avec une surveillance quotidienne si possible, de même qu’un encadrement important + utilisation d’indices externes, etc. Je crois avoir omis de l’écrire en conclusion du rapport, mais une anosognosie était également évidente.
Suite à l’évaluation, le diagnostic neuropsychologique a permis à monsieur d’être hébergé dans une ressource de type familial. Depuis le début de cet hébergement, plusieurs problèmes ont du être surmontés et travaillés avec la proprio, conjointement avec le psychoéd. au dossier: hygiène dans la demeure, heures des repas, heures d’entrée et de sortie, menaces d’agressivité, querelles avec les autres usagers, etc. Quelques accommodements et ententes ont été accomplis, mais les problèmes rebondissent 6-7 mois plus tard.
Ma question: 1) existe-t-il d’autres services, plus adaptés à la situation de ce client, même si on n’a toujours pas de d(x) médical et qu’il n’y a aucun MD au dossier? C’est certain que dans un monde parfait, cette personne pourrait bénéficier d’un(e) intervenant(e) ou d’un éducateur quotidiennement, pour l’aider à moduler certains comportements, faire de petits apprentissages, etc., mais pour le moment, la tâche réside dans les mains de la proprio., qui doit gérer la résidence, et dans les mains du psychoéd., qui ne peut offrir qu’une heure de rencontre par semaine ou au besoin, et dont les compétences sont plutôt moyennes selon les collègues qui le côtoient. Ou au contraire, est-ce qu’on se retrouverait avec le même problème même si M. bénéficiait d’un suivi médical?
En vous remerciant pour votre participation à mon initiation de discussion de cas!