Accueil – Visiteurs Forums Évaluation adulte et gériatrie Mémoire Évaluer la mémoire affective ???

  • Évaluer la mémoire affective ???

    Posted by Claudine Boulet on 17 avril 2018 à 20 h 01 min

    Bonjour,

     

    Dans un de nos CHSLD, nous avons une résidente âgée de 65 ans qui est atteinte de la sclérose en plaques depuis plus de 30 ans. Cette dame présente une atteinte sévère de l’ensemble de ses fonctions cognitives et un langage limité (réponses très courtes à des questions très concrètes).

     

    Cette dame est sous curatelle et détient un patrimoine très important. Elle est issue d’une grande famille où il y a beaucoup de chicanes la concernant. Notamment, il y a une mésentente à savoir si une telle personne a le droit de visiter la dame en question ou non. C’est un conflit qui va se retrouver devant un tribunal.

     

    On me demande si je peux objectiver que madame a une mémoire affective. Plus précisément, on me demande si je peux évaluer s’il est possible que: même si madame ne peut dire quand a eu lieu la dernière visite d’une personne donnée, elle peut tout de même être contente de voir cette personne, dans le moment présent, d’autant plus qu’elle connaît cette personne depuis plus de trente ans.

     

    Pour moi, cette mémoire affective va de soi mais je ne vois pas trop comment l’objectiver. À moins de me cacher une aiguille dans la main et de vérifier si madame accepte de me serrer la main lors de mes prochaines visites… :/ Mes maigres recherches ne relèvent que des tâches expérimentales.

     

    Auriez-vous une autre idée?

     

    Ou sinon, auriez-vous des références à me recommander que je pourrais citer?

     

    Merci beaucoup!

    Claudine Boulet répondu Il y a 5 années, 3 mois 3 Membres · 8 Réponses
  • 8 Réponses
  • Simon Charbonneau

    Membre
    17 avril 2018 à 20 h 37 min

    Je pense qu’ils ont juste mal “étiqueté” cette demande. Oublions le terme de mémoire affective. Ils veulent savoir si elle est… apte à décider qui peut la visiter ?!

     

    Il est possible qu’elle ait toujours eu une bonne relation avec la personne en question, et là je nsp l’état de leur relation mais tu sembles dire qu’elle oublierait les rencontres récentes au fur et à mesure… bon…

     

     

    Peut-être qu’ils devraient simplement implanter un protocole simple où les visiteurs doivent appeler avant de venir, et là le personnel va demander à la dame si ce jour elle est disposée à recevoir tel ou tel visiteur… oui ou non

     

     

    S’il y a des risques de captation d’héritage/abus/manipulation, c’est plus complexe… et s’il y a de tels risques, c’est selon l’équipe ou la famille ? Des fois les accusateurs sont ceux qui ont qqchose à se reprocher… p-e qu’un membre du personnel pourrait alors être présent ? (genre de visites supervisées?)

     

     

    Quel est l’opinion à ce sujet de la personne qui joue le rôle de curateur ?

  • Claudine Boulet

    Membre
    18 avril 2018 à 13 h 47 min

    En fait, la dame a un ami depuis plus de trente ans. Ce n’est pas clair s’ils ont déjà été plus qu’ami ou pas mais peu importe. C’est un homme très particulier (probablement avec une composante psy) qui piquent facilement des crises pour des niaiseries. Il faut cependant comprendre ici que l’ami est le même depuis toujours. Ce qui veut dire que madame a entrepris sa relation avec lui alors qu’elle avait toute sa tête, relation qui dure encore aujourd’hui malgré sa détérioration à elle. L’entente actuelle est que cet ami a le droit de visiter madame sous la supervision d’un garde de sécurité payé par madame. Garde de sécurité qui est là pour assurer la sécurité de madame et calmer les débordements de l’ami.

     

    Madame a toujours l’air contente de voir son ami. Elle ne montre aucun signe de perturbation avant, pendant ou après ses visites. Si l’ami fait une crise, elle lève les yeux au ciel sans plus. Elle n’est pas capable de dire précisément c’est quand la dernière visite de son ami mais elle est capable de dire correctement si ça fait longtemps ou pas. Si on lui demande si elle veut encore voir son ami, elle répond que oui. Par contre, si elle ne le voit pas et qu’on ne lui en parle pas, elle n’en fait aucune mention. Elle ne demande jamais à le voir.

     

    La famille dont la curatrice (qui est une membre de la famille et une des héritières) veulent cesser de payer pour le garde de sécurité (possible conflit d’intérêt parce que l’argent qui va au garde de sécurité diminue leur héritage…).

     

    Mon CSSS conteste cette décision attestant que madame est contente de voir son ami et qu’on ne peut pas la priver de ses visites.

     

    Alors oui, la question peut être: est-ce que madame est apte à décider qui peut la visiter. Mais comme j’ai dit, on est dans le extrêmement concret avec madame et on ne peut pas lui poser une question ouverte. Alors, c’est pourquoi on m’a demandé s’il est possible de démontrer qu’elle a encore une mémoire affective, ce qui expliquerait qu’elle est contente de voir son ami, qu’elle a le droit à recevoir sa visite et que ça vaut la peine qu’elle paie pour recevoir sa visite.

     

    Je vais faire des recherches sur la question mais je prenais d’emblée une chance… si quelqu’un a une référence à me conseiller sur la question…

  • Simon Charbonneau

    Membre
    18 avril 2018 à 21 h 07 min

    Alors je te recommande cet extrait d’un article de … 1895 ! ;)https://www.jstor.org/stable/2175845?seq=1#page_scan_tab_contents

  • Simon Charbonneau

    Membre
    19 avril 2018 à 15 h 53 min

    Même si c’est re: DTA, ceci serait p-e pertinent:

     

    https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4175156/pdf/wnn-27-117.pdf

  • Claudine Boulet

    Membre
    19 avril 2018 à 17 h 32 min

    Wow, un énorme merci, Simon! Ça me donne un super bon point de départ… :)

    Karen Debas

    Membre
    27 avril 2018 à 15 h 07 min

    J’aurai aussi tendance à me fier sur ce qui est rapporté par l’équipe: elle est contente pendant et après les visites. Donc l’apport semble bénéfique et il y a sûrement des raisons cognitives pour lesquelles elle ne fait pas la demande de le voir (apathie, manque d’initiation ect.). Avec ces infos, j’ai l’impression que la curatrice ne respecterait pas son rôle “lorsque vous intervenez en son nom (la patiente), vous devez agir uniquement dans son intérêt.”

    https://www.curateur.gouv.qc.ca/cura/fr/majeur/client/representant/tuteur/index.html

  • Claudine Boulet

    Membre
    30 avril 2018 à 14 h 27 min

    Effectivement Karen, c’est d’ailleurs la position de mon CSSS mais la famille argue que ça ne change rien pour madame qu’elle le voit ou pas… À suivre…

  • Claudine Boulet

    Membre
    7 juin 2018 à 14 h 28 min

    Un article m’amenant à en trouver d’autres, finalement j’en ai accumulés une petite pile. Si quelqu’un est intéressé, je pourrai partager avec plaisir.

     

    En gros, ce que je retiens des études sur la mémoire affective est:

     

    Le fait qu’un contenu émotif est rappelé plus fidèlement et plus rapidement qu’un contenu non-émotif a été maintes fois démontré. Les recherches effectuées auprès de patients présentant un trouble neurocognitif (TNC) majeur montrent toutefois des résultats divergents sur cette question. Une analyse plus détaillée de ces résultats suggère que l’effet d’un contenu émotif (c’est-à-dire le fait qu’un contenu émotif soit plus rapidement et plus fidèlement rappelé) est aussi présent chez cette population, à la condition que la tâche ne nécessite pas l’apport des fonctions exécutives.

    Par ailleurs, une procédure où on fait écouter un court vidéo suscitant une émotion soit de tristesse ou de joie, à des patients amnésiques ou souffrant de la maladie d’Alzheimer, a démontré que l’état émotif induit persiste dans le temps même si la personne ne se souvient plus d’avoir écouté les vidéos ayant suscité l’émotion.

     

    Tout cela reste expérimental toutefois et je n’ai rien trouvé de clinique. Cela dit, mes lectures m’ont tout de même inspirée pour bâtir un questionnaire maison que j’ai administré à une infirmière qui connaît très bien la patiente depuis de nombreuses années et un autre questionnaire que j’ai administré à la patiente. Encore une fois, cela me ferait plaisir de partager si d’autres sont confrontés à une situation semblable…